Les répercussions bioéthiques de la nouvelle administration qui a pris ses fonctions hier à la Maison Blanche dépassent les frontières nationales. Elles traversent l’océan et se dirigent vers l’Afrique. Quelques heures après la prestation de serment de Joe Biden et Kamala Harris à Washington, les dirigeants de l’Eglise catholique africaine se sont élevés contre le programme pro-avortement de la nouvelle administration des Etats-Unis.
Nouvel administrateur à l’USAID.
Les préoccupations portent sur l’USAID, l’agence gouvernementale américaine qui gère l’aide aux pays en développement. Le 13 janvier, Biden a annoncé la nomination de Samantha Power au sein de l’administration de cette agence. Elle est une journaliste et diplomate lauréate du prix Pulitzer qui, pendant la présidence de Barack Obama, a joué un rôle au sein du Conseil National de Sécurité où elle s’est distinguée entre autres activités, par son soutien à la cause LGBT+.
Un président pro-avortement, pro-LGBT+
Selon certains dirigeants de l’Église catholique africaine, contactés par AciAfrica., la nomination de Power va déclencher “une attaque culturelle et idéologique” sur le continent noir “par la promotion de programmes contraires à la culture africaine, tels que l’avortement et l’homosexualité”. Mgr Emmanuel Badejo, du diocèse d’Oyo au Nigeria, estime que Power complique une situation déjà défavorable, considérant que Biden, bien qu’il se dise catholique, est sur le point de devenir “le président le plus radicalement pro-avortement et pro-LGBT+ de l’histoire des Etats-Unis”.
Le prélat est donc convaincu que les quatre prochaines années seront très difficiles pour l’Église. “Nous devons renforcer la foi afin de survivre au conflit” qui va inévitablement surgir avec la nouvelle politique américaine, témoigne Mgr Badejo. Un jugement quasiment identique à celui exprimé il y a quelque temps par le président des évêques catholiques américains, Mgr José Horacio Gómez.
Du poison offert comme aide
Ce que demande l’évêque nigérian, à travers AciAfrica, c’est beaucoup de réalisme dans le combat qui attend les chrétiens sur le front de la défense de la vie et de la famille. “Nous avons besoin d’une éducation ciblée”, a tonné Mgr Badejo, “d’une catéchèse appropriée, d’une dénonciation prophétique du poison qui sera offert à l’Afrique sous forme d’aide et de développement”.
L’avortement et l’aide
Pour sa part, le père Bonaventure Luchidio, directeur national des Œuvres Pontificales Missionnaires au Kenya, affirme que l’Afrique a effectivement besoin d’un coup de pouce en matière de soutien au développement et d’aide humanitaire, mais il considère qu’il est “contraire à l’éthique et immoral” d’inclure ces besoins dans un ensemble qui comprend également un programme radical sur les questions de bioéthique. La même préoccupation est partagée par le père Zacharia Samjumi, secrétaire général du Secrétariat catholique du Nigeria. “Les organisations qui promeuvent les valeurs traditionnelles”, se plaint-il, “se voient refuser un soutien financier, alors que celles qui se concentrent sur les modes de vie aberrants, tel que la contraception et l’avortement reçoivent beaucoup d’argent”.
Contrôle de la population
Le père Samjumi donne l’exemple de l’ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan, un catholique, qui aurait été “littéralement snobé par l’administration Obama pour avoir signé une loi interdisant les mariages homosexuels“. Le manque de soutien américain, selon l’ecclésiastique, aurait coûté à Jonathan la défaite contre le terrorisme islamique et le fait de ne pas être réélu pour un second mandat en 2015.
Le père Samjumi note que les programmes des agences occidentales en Afrique visent à promouvoir des “objectifs impérialistes contre la vie”, voire même à “embrouiller les esprits impressionnables des enfants dans les écoles, à propos de leur sexualité”. Pour le père Joseph Tanga-Koti, secrétaire général des évêques catholiques de la République Centrafricaine, la nomination de Power s’inscrirait dans “un plan de réduction de la population de l’Afrique”.
Une religieuse pour la vie
Mais le prix à payer serait très élevé : “Mort, stérilité, sexe facile, prostitution, violation de la dignité humaine”, a énuméré le père Tanga-Koti. Sœur Paule Valérie Mendogo, de la Congrégation des Sœurs Servantes de Marie à Douala, au Cameroun, explique que le désir des fidèles en Afrique est de mettre fin à “la manipulation des lobbies et des mass-media, qui promeuvent et cherchent des moyens de forcer les Africains à s’engager dans une révolution anti-chrétienne radicale”. La religieuse rappelle que “dans les langues africaines, il n’y a pas de traductions pour l’avortement et l’homosexualité”. Mais la novlangue orwellien est déjà prête à débarquer en Afrique aussi.