La semaine dernière, le gouvernement grec de centre-droit a ordonné à l’administration du métro d’Athènes de retirer une série de publicités informatives pro-vie de ses stations. Les affiches sont apparues le lundi 13 janvier et elles représentaient un fœtus dans le ventre de sa mère, entouré d’une série de questions sur le développement de l’enfant à naître au cours des différentes étapes de la gestation.
Les affiches ont été créées par le groupe pro-vie “Afiste Me Na Ziso” (“Laissez-moi vivre”) et les questions sur les affiches se lisent comme suit:
Saviez-vous que l’enfant à naître:
- a son coeur qui bat à partir du 18e jour?
- manifeste un début d’activité cérébrale à partir du 42e jour?
- dispose de tous ses organes formés à partir de la 8e semaine?
- peut ressentir de la douleur à partir de la 10e semaine?
Finalement, le poster lançait cet appel: “Choisis la vie!”
Les réactions ont été immédiates et furieuses: de nombreuses personnes sur les réseaux sociaux ont demandé au métro d’Athènes de retirer immédiatement les affiches; et plusieurs personnalités publiques, dont des membres du parti social-démocrate (KINAL) et des membres du parti de gauche (SYRIZA), ont exprimé leur dégoût devant la représentation d’un embryon sur les affiches.
La controverse a rapidement atteint le Capitole, et le ministère des Transports a publié une déclaration disant que ces publicités offensaient les femmes et leur droit incontestable à l’avortement qui est protégé par la loi. [L’avortement en Grèce est légal depuis 1986.] En conséquence, le gouvernement a ordonné la suppression des affiches au motif que “les campagnes menées dans les lieux publics ne devraient pas diviser l’opinion publique ni insulter directement les femmes qui sont obligées de faire un choix difficile comme celui d’avoir un avortement. “
La discussion est devenue d’importance nationale lorsqu’un journal sportif local a décidé de mettre le message “Laissez-moi vivre” sur sa première page, ainsi qu’un article critiquant la rhétorique des droits des femmes comme négligeant notoirement les droits des enfants à naître et soulignant que, lorsque les femmes recourent à l’avortement, elles ne retirent pas d’elles-mêmes un morceau de cellules, mais une vie humaine à laquelle elles ont fait don de la moitié de leur patrimoine génétique. L’article soulignait également que l’intervention du gouvernement menaçait la liberté de pensée, qualifiant l’ordre de retirer les affiches d’acte de “fascisme progressiste“.
Le gouvernement défend officiellement le droit à l’avortement mais essaie en même temps d’en éluder les conséquences en invitant les familles à avoir plus d’enfants, offrant jusqu’à 2000 € de bonus par enfant. En fait, la Grèce a l’un des taux de natalité les plus bas d’Europe. Si l’on ajoute à ce chiffre le nombre élevé d’avortements pratiqués, qui est estimé à 300 000 par an sur une population de 11 millions d’habitants, force est de constater que le pays est confronté à une crise démographique inquiétante. A titre de comparaison, en Italie – qui est un pays de 60 millions d’habitants -, il y a environ 80 000 avortements annuels. Les experts disent que la Grèce est l’un des Etats européens qui souffre le plus de la baisse des naissances, une situation aggravée par la longue crise économique de la dernière décennie, au cours de laquelle les avortements ont augmenté de 15%.
En Grèce, l’avortement a été légalisé au milieu des années 80 et il n’y a pas eu de débat public sur cette question depuis. Les affiches récentes sont les premières du genre à paraître en public: la force de ce fœtus ici est de pouvoir secouer les consciences après trente-cinq ans de silence.
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