En avril 2001, les Pays-Bas étaient censés “briser une barrière psychologique”. C’est ce qu’a déclaré Deborah Annetts, de la Voluntary Euthanasia Society, dès que le Parlement néerlandais a adopté la première loi européenne légalisant la “bonne mort”. Vingt ans se sont écoulés depuis, et plutôt qu’une “barrière psychologique”, c’est un gouffre qui s’est ouvert aux Pays-Bas.
Le supporter repenti
Il suffit de dire que la première année après l’adoption de la loi, il y a eu 1 882 cas d’euthanasie, et qu’en 2019, il y en a eu 6 361. Une augmentation de mort qui a ébranlé la conscience de certains de ses plus fervents partisans. Comme le professeur Theo Boer, qui a été membre pendant neuf ans de la commission de contrôle néerlandaise chargée de surveiller la mise en œuvre de la loi dans les délais prescrits. Dans une interview de 2015 avec le magazine Times M. Boer a reconnu que les opposants à la “bonne mort” avaient raison lorsque, avant l’adoption de la loi, ils ont averti que les Pays-Bas venaient d’ouvrir “la boite de pandore”.
Une souffrance insupportable”.
Dans l’ombre des moulins à vent, le débat sur cette question a commencé à la fin des années 1960, lorsque l’influent psychiatre Hendrik van den Berg a affirmé que les médecins infligeaient de grandes souffrances à leurs patients en les traitant avec acharnement. Après plus de trois décennies de débats, la loi a été adoptée, ce qui a également été salué par Boer. Toutefois, dans le même entretien avec Tempi, le professeur néerlandais a noté que l’euthanasie “est devenue de plus en plus normale et répandue” et que “de nombreux autres types de souffrance, notamment existentielle, sociale et psychiatrique, sont devenus des raisons suffisantes pour demander l’euthanasie”. Boer a fait valoir que certains critères pour la mise en œuvre de l’euthanasie “étaient supposés implicitement”. Par exemple, il a expliqué que la “souffrance insupportable” était un critère, mais il n’a pas dit comment on pouvait la préciser”.
Données
L’imprécision législative a eu un effet. Il y a quelques années, le journal Avvenire dans l’encart Èvita a passé au crible les données divulguées par la Commission de contrôle néerlandaise dont Boer était membre dans le passé. Eh bien, ce qui est ressorti, c’est qu’en 2010, l’euthanasie aux Pays-Bas ” a été appliquée pour 25 personnes atteintes de démence et 2 de troubles mentaux graves. En 2011, les cas sont passés à 49 et 13, et on doublé en 2015, lorsque les deux catégories ont atteint 109 pour les cas de démence et 56 pour les troubles mentaux “. Seuls 10 de ces cas ont été signalés aux autorités judiciaires”. Il y a vingt ans, ceux qui dénonçaient l’ouverture de la “boite de pandore” font aujourd’hui figure de Cassandre. Le 7 décembre de cette année, la prestigieuse revue médicale Jama a publié un article dénonçant la facilité avec laquelle l’euthanasie est appliquée aux Pays-Bas.
Euthanasie pour “vie accomplie”.
Mais ce n’est pas fini. Ou plutôt, quelqu’un aux Pays-Bas veut aller encore plus loin. Il y a un an, à la même époque, le Parlement de La Haye débattait d’une loi prévoyant l’euthanasie pour “vie terminée”. De quoi s’agit-il ? Le cardinal Willem Jacobus Eijk, archevêque d’Utrecht l’a expliqué dans une interview à InsideOver : “Cette conception implique que les personnes âgées de plus de 75 ans, non pas malades mais en bonne santé, qui sont convaincues que leur vie n’a plus aucun sens et sont donc ‘épanouies’, peuvent demander le suicide assisté”. Le cardinal a noté que fixer la limite à 75 ans “suggère que la vie perd sa valeur essentielle à partir de cet âge”. Il s’agit d’une limite arbitraire qui, en tant que telle, pourrait même être abaissée demain. Le concept de “boite de pandore” risque donc de se répéter ad libitum.
Belgique
Et quid la Belgique voisine ? Même là-bas, l’euthanasie a été approuvée il y a de nombreuses années, en 2002. Et là aussi, il y avait un plan incliné. Selon un groupe de recherche dirigé par Kaspar Raus, expert en éthique et en santé publique de l’université de Gand, le système de contrôle en Belgique qui était censé mettre fin aux abus a échoué. Comme le rapporte le site web Care for that believe, l’une des raisons de cet échec serait le fait que la loi sur l’euthanasie a été modifiée au fil des ans.
Si, à l’origine, il n’était autorisé que pour les maladies graves, incurables et insupportables, il a été décidé au fil des ans que les patients atteints de “polypathologie” pouvaient également y avoir accès. C’est-à-dire les nombreux maux associés à la vieillesse, comme la perte de la vue et de l’ouïe, les douleurs chroniques et la faiblesse. En 2019, dans 17,3 % des cas d’euthanasie en Belgique, la “polypathologie” était mentionnée et dans 47 % des cas, les patients ne souffraient pas d’une maladie en phase terminale. La Belgique qui, rappelons-le, est passée de 24 cas d’euthanasie en 2002 à 2 656 en 2019. Une “boite de pandore” similaire au plan néerlandais. Ce que certains partisans italiens de la “bonne mort” devraient peut-être envisager aujourd’hui, de peur de s’en rendre compte trop tard dans vingt ans.
Discussion à ce sujet post