Le sort de l’avortement aux USA sera bientôt fixé : Ce sera tout ou rien

La Cour Suprême des Etats-Unis a entendu aujourd'hui les plaidoiries dans une affaire historique, qui examinera l'exactitude des verdicts qui ont légalisé l'avortement dans ce pays.

La plaidoirie a été présenté à la Cour Suprême des États-Unis dans l’affaire capitale Dobbs contre Jackson Women’s Health Organization, qui remet en cause le droit constitutionnel à l’avortement aux Etats-Unis. Il est toujours difficile d’interpréter les plaidoiries en fonction de la manière dont les juges pourraient statuer dans une affaire si particulière. Avec cette mise en garde à l’esprit, voici mes prédictions et hypothèses auxquelles je suis parvenu jusqu’à présent : Les arguments montrent clairement que c’est quitte ou double pour Roe et Casey. Il semble y avoir peu d’intérêt pour un “juste milieu”. Et les chances sont clairement en faveur de l’annulation de ces deux décisions horribles.

Permettez-moi tout d’abord de dire que je pense que le solliciteur général du Mississippi, Scott Stewart, a fait un excellent travail en présentant la position pro-vie selon laquelle les arrêts Roe et Casey ont été décidés à tort et devaient être annulés. Ils étaient erronés le jours où ils ont été décidés et ils le sont encore aujourd’hui. Il n’y a rien dans la constitution, l’histoire ou la tradition de l’Amérique qui crée un droit fédéral à l’avortement. Les cinquante années de conflit qui ont suivi Roe et les trente années qui ont suivi Casey ont démontré que non seulement les décisions sont erronées, mais qu’elles ne peuvent être administrées de manière prévisible et équitable. Le moment est venu pour la Cour de renvoyer la question de l’avortement là où elle doit être – aux États.

Les trois juges libéraux de la Cour ont clairement indiqué qu’il était hors de question pour eux d’annuler Roe et Casey, ou de changer quoi que ce soit à ces arrêts. Selon eux, cela aurait des conséquences désastreuses pour les femmes et les priverait essentiellement du droit de participer à la société sur un pied d’égalité. Les ‘avocats’ pro-avortements, Jackson Women’s Health Organization, et le Solliciteur General de l’administration Biden ont fait écho à ces propos. Cette stratégie semble exclure toute idée d’un compromis qui préserverait le “droit” constitutionnel à l’avortement tout en modifiant les règles relatives à la manière et au moment où il peut être restreint. C’est une stratégie légale du tout ou rien.

Le président de la Cour Suprême, John Roberts, a été considéré par beaucoup comme quelqu’un qui pourrait favoriser une position de compromis, et il l’a fait à plusieurs reprises au cours de la plaidoirie, suggérant qu’il pourrait être ouvert à l’idée d’éliminer la norme de viabilité actuelle – le moment où un enfant à naître est considéré comme capable de survivre en dehors de l’utérus, actuellement à 24 semaines. Si la viabilité n’était pas le critère d’examen, et qu’il s’agissait plutôt de déterminer si une loi représente une charge excessive pour le “droit” d’une femme à l’avortement, alors l’interdiction de 15 semaines du Mississippi pourrait bien être jugée constitutionnelle. Toutefois, comme nous l’avons mentionné, cette position de “compromis” proposée par Roberts n’a trouvé aucun soutien auprès des partisans de l’avortement ou des trois libéraux de la Cour.

On a dit que le juge Brett Kavanaugh pourrait également constituer un vote décisif, mais ce dernier a indiqué à plusieurs reprises que la Constitution ne dit rien sur le droit à l’avortement et a semblé adopter la position du Mississippi selon laquelle la Cour devrait être “scrupuleusement neutre” sur la question, permettant aux États de régler les problèmes comme leurs citoyens et leurs représentants élus le jugent bon. Il a souligné qu’il y a des intérêts critiques des deux côtés de cette question. Les femmes ont un intérêt pour l’intégrité corporelle et la liberté, tandis que l’enfant à naître a un intérêt pour le maintien de sa vie. Ces intérêts sont irréconciliablement en conflit ; un intérêt doit prévaloir sur l’autre à tout moment. La question, a-t-il demandé de manière rhétorique, est de savoir ce que dit la Constitution pour résoudre ces questions difficiles. Pourquoi cette Cour devrait-elle être l’arbitre plutôt que le Congrès, les législatures des États et le peuple ?

Comme prévu, l’un des principaux objectifs des partisans de l’avortement était de faire reposer leur position sur la doctrine juridique du “stare decisis” (règle du précédent, ndlr), le principe selon lequel, puisque les gens s’appuient sur les décisions de la Cour Suprême pour organiser leur vie, ces décisions doivent être préservées même si l’on pense qu’elles ont été prises à tort. Cette notion a été directement remise en question par le juge Alito, qui a demandé au Solliciteur General des États-Unis et à l’avocat de la société d’avortement de répondre par oui ou par non à la question de savoir si une décision qui était clairement erronée au moment où elle a été rendue devait être annulée sur cette seule base. Les avocats ont fini par dire que non, même les précédents clairement erronés devraient être maintenus en raison de la confiance que les citoyens leur accordent.

Le juge Kavanaugh, qui a énuméré une longue série d’arrêts majeurs de la Cour Suprême des États-Unis qui ont renversé des précédents erronés, a totalement démenti cette affirmation. Pour moi, cela a été dévastateur pour la position des partisans de l’avortement.

J’ai la forte impression que les juges Thomas, Alito, Gorsuch et Kavanaugh ont tous posé des questions suggérant fortement qu’ils rejettent l’idée que les verdicts devraient être confirmés dans les cas des cas où ils ont été mal décidés comme Roe et Casey. Si on essaie de lire l’avenir, on dirait donc que ce sont quatre des cinq juges nécessaires pour une majorité.

Cela m’amène à la juge Amy Coney Barrett. D’une part, elle a évoqué à plusieurs reprises les lois omniprésentes sur les “refuges” qui permettraient aux femmes de laisser les nouveau-nés non désirés dans divers endroits tels que les casernes de pompiers et d’être libérées de toute obligation parentale ultérieure. Son questionnement sur ce point met à mal tout le défilé d’horreurs soulevées par les partisans de l’avortement sur les conséquences de la “parentalité forcée” et de la “maternité forcée” – impacts supposés sur la carrière, les revenus futurs, la future formation d’une famille, etc. Elle a reproché à l’avocat de Jackson Women’s Health d’avoir mis l’accent sur ces supposés problèmes sans reconnaître que les femmes pouvaient facilement les éviter grâce aux possibilités de refuge existantes.

D’autre part, M. Barrett s’est également demandé ce qui se passerait si un État avait une disposition constitutionnelle identique au 14e amendement et si un tribunal d’État décidait que les avortements étaient protégés jusqu’au deuxième trimestre, soit 27 semaines. Une telle décision augmenterait effectivement le droit à l’avortement au-delà de la norme de viabilité de Casey (généralement considérée comme étant de 24 semaines). Ses hypothèses m’ont fait dresser l’oreille, et je me suis demandé si elle ne serait pas prête à envisager l’approche du “juste milieu” de Roberts. Mais je m’inquiète peut-être pour rien. Un analyste juridique que je respecte beaucoup, Ed Whelan, a déclaré : “Rien de la part des juges Thomas, Alito, Gorsuch, Kavanaugh ou Barrett n’a déclenché la sonnette d’alarme dans mon esprit. Au contraire.”

Encore une fois, dans la plupart des cas il est difficile de lire l’avenir, et ça l’est encore plus dans un cas aussi important que celui de Dobbs. Cela dit, je ne vois pas comment Roberts pourrait obtenir 5 voix pour son approche “intermédiaire”, à moins qu’il ne parvienne à convaincre les trois libéraux de se rallier à une idée à laquelle ils sont tous fermement opposés. Il y a au moins quatre juges qui, à mon avis, abrogeront Roe et Casey. Barrett en ferait cinq. Sommes-nous face à une décision de 5-4 ?

Je vous laisse avec l’observation de l’analyste juridique de la National Review, Dan McLaughlin, “Maintenant, nous attendons jusqu’à la fin juin, et bien sûr, nous espérons que rien n’arrivera aux juges dans cet intervalle. Mais il est difficile de voir comment les pro-vie pourraient être plus optimistes quant à la façon dont les plaidoiries ont été menées… Par le passé, dans bien des cas on nous a retiré le ballon juste avant de marquer le but, alors prenons tout cela avec du recul. Mais si on devait envisager que la Cour renverse finalement Roe, c’est à peu près cette plaidoirie que l’on aurait attendu.”

Prions pour que cesse l’abomination qu’ont été Roe et Casey. Les âmes de quelque 60 millions d’enfants à naître sacrifiés se joignent à nous dans la prière.

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