Saint Macaire l’Egyptien prit possession de son ermitage en l’an 330 après Jésus-Christ. Peu à peu des milliers de moines se rassemblèrent autour de lui pour recevoir son enseignement. Il en fut de même pour plusieurs laïcs d’Egypte qui ne cessaient de lui rendre visite dans le but de bénéficier du fruit de son amour pour eux. Sa renommée se répandit ainsi dans toute la contrée.
Un jour des pélerins vinrent au village des moines pour voir Abba Macaire. Ils avaient pris soin d’emporter avec eux un plein panier de raisins odoriférants. Ils restèrent longtemps avec lui. Enfin spirituellement rassasiés par ses précieux conseils ils finirent par prendre congé de lui.
Ceci est pour toi, Abba. Nous savons que tu raffoles de raisin. Garde-les, nous t’en prions !
Abba Macaire les remercia et tout en souriant les reconduisit jusqu’à l’entrée du village.
Au milieu de sa pauvre hutte trônait maintenant le panier avec ces superbes raisins. Cadeau rare en ce lieu désert !
Ils doivent être succulents, se dit le saint et il voulut en goûter. Mais tandis qu’il se penchait vers le panier il vit de sa fenêtre les autres moines et il fut pris de remords.
– il n’est pas juste que je garde ce raisin pour moi seul, pensa-t-il, alors que les autres pères n’en ont point. Mieux vaut offrir ces fruits à Abba Pierre. Il est le plus âgé de nous tous et cela lui fera plaisir. Sitôt dit sitôt fait.
– Regarde Abba, dit Macaire avec un beau sourire, on vient de me remettre ces grappes. Je sais combien tu aimes manger du raisin. La paix donc soit avec toi. Il est à toi !
– Grand merci, Abba ! répondit le vieillard et que Dieu te bénisse. Une fois Macaire sorti, Abba Pierre se saisit d’une grappe.
– Oh là, un instant se dit-il. Les autres pères n’en ont pas reçu… Je sais qu’Abba Isidore aime le raisin. Et de ce pas il se rend auprès de lui et lui remet le fameux panier.
– Abba on vient juste de me donner ces grappes. La paix soit avec toi, garde-les. Je sais que tu aimes en manger.
– Que Dieu te bénisse répondit Abba Isidore. Mais lui aussi ne les conserva pas pour son usage. Il se disait “il n’est pas juste que j’en profite tout seul”. Et il s’en alla les présenter à un autre moine. Ce dernier en fit autant, ainsi que le suivant, et du matin jusqu’au coucher du soleil, le panier passa de mains en mains sans qu’aucun moine ne toucha à son contenu, chacun se disant que le voisin en aurait plus besoin que lui. Le dernier moine se dit lui aussi “c’est péché que de les garder pour moi. J’en connais un auquel ces raisins feront un immense plaisir”. Et il se rendit prestement chez saint Macaire.
– Abba je sais combien le raisin te plaît. Il t’es justement destiné. La paix soit avec toi, garde-le.
Quand Macaire vit le plein panier de raisins intact, il rendit grâces à Dieu qui avait rempli ce village de moines si pleins d’amour et de miséricorde. C’est alors que surgirent dans sa cellule des visiteurs venus de très loin pour prendre sa bénédiction. Alors, débordant de joie, il leur dit : “prenez mes fils, ces raisins de l’amour. Ces sont les fruits les plus sucrés du monde”. Et il leur raconta toute l’histoire.